Le relief est un facteur qui peut rebuter de potentiels cyclistes. Mais qu’en est-il réellement à Liège ? La zone plate de vallée n’est-elle pas en fait suffisamment étendue et dense en activités humaines pour faire de Liège une ville cyclable ? Finalement, le plus gros frein au vélo à Liège est-il dû au relief ou au manque de volonté politique ?
Michel Firket, échevin de la Mobilité, soulignait en 2015 : « Une ville au relief aussi marqué que Liège n’est pas particulièrement propice aux déplacements à vélo » (Le Vif l’Express, 08/05/2015, p.94). Cette idée largement répandue dans les esprits est pourtant largement biaisée, comme nous allons le démontrer.
A partir de pentes de 4% (soit 4 mètres de dénivelé sur une distance de 100 mètres), la pratique du vélo peut devenir une contrainte pour le cycliste quotidien car elle demande un effort physique plus important. Sur cette base, le GRACQ Liège a délimité différentes zones de relief, et mesuré la répartition de la population afin de mieux estimer le potentiel cyclable de la Ville.
En étudiant la répartition de la population dans les différentes zones de relief, on constate que 52,1% de la population liégeoise habite dans la vallée, soit 102 640 habitants. Cette zone de relief accueille également une grande partie des services et équipements, de l’emploi et des lieux de scolarité, donc des zones de destination. Il s’agit donc d’un grand potentiel de cyclistes "classiques".
Ce potentiel situé sur le territoire de la Ville de Liège augmente si l’on tient compte des zones plates qui prolongent la vallée de la Meuse dans les autres communes (Herstal, Oupeye, Seraing, Chaudfontaine). Au total, à moins de 10 km de l’hyper-centre, la zone de relief du fond de vallée rassemble 151 500 habitants, soit un haut potentiel de cyclistes quotidiens pouvant utiliser un vélo classique.
Potentiel du vélo à assistance électrique (VAE)
Le VAE ouvre des potentialités à toutes les populations habitant les quartiers de pente ou de plateau. Au-delà du relief, le VAE permet également de parcourir une même distance à des vitesses plus élevées, donc de gagner en temps de parcours et d’agrandir la "zone de cyclabilité". Grâce à l’effort moindre qu’il nécessite par rapport à un vélo classique, le VAE permet également de capter de nouveaux utilisateurs (personnes âgées ou réticentes à l’effort physique).
Le potentiel de cyclistes en VAE peut être estimé au total des habitants liégeois et de l’ensemble des habitants situés à moins de 10 km de l’hyper-centre, soit 383 000 habitants. Ce potentiel est énorme et laisse envisager qu’atteindre une part modale vélo de 10% est à la portée de pouvoirs politiques un peu entreprenants.
Conclusion et recommandations
Vu le potentiel de cyclistes de fond de vallée, Liège dispose déjà à la base d’un environnement propice à la pratique du vélo. Avec le développement du VAE, ce potentiel explose et n’offre plus aucune excuse (à part l’accessibilité financière pour l’achat d’un VAE) à ceux qui pensent que Liège est trop vallonnée pour en faire une ville cyclable.
Pour mobiliser ce potentiel, des investissements sont nécessaires. Les recommandations sont connues mais peu mises en pratique : que ce soit sur le plat avec un vélo classique ou sur un relief escarpé avec un VAE, la pratique du vélo ne saura être amplifiée qu’en créant des infrastructures sécurisantes pour les cyclistes. Des itinéraires spécifiques doivent donc également être créés sur des voiries pentues.
Étant donnée la cherté du VAE, il est également nécessaire de faciliter l’acquisition d’un VAE pour les publics les moins aisés et de développer du stationnement sécurisé aux endroits stratégiques de la ville.
Après cette analyse, il apparait que le principal frein au développement du vélo est sans doute plus la frilosité de la classe politique que le relief. Avec un budget crédible alloué au vélo (au moins 10€/an/habitant), Liège peu mener une politique cyclable crédible qui pourrait changer, en bien, la ville.