Le Parlement européen avait adopté en février une résolution demandant à la Commission européenne de définir une véritable stratégie vélo à l'échelle de l'Union. Une demande déjà formulée par les associations cyclistes européennes et 18 états membres. Toute cette pression sur la Commission a porté ses fruits, puisque celle-ci vient d'annoncer ce 9 mars un plan vélo européen ambitieux d'ici l'été 2023.
Cela fait des années que les associations cyclistes demandent à la Commission européenne de mettre en place une stratégie vélo supranationale, sans succès jusqu'à présent.
Sous l'impulsion de la Belgique, 18 états membres ont récemment signé une déclaration européenne en faveur du vélo, demandant que l'on aille aussi dans ce sens. En février c'est le Parlement européen qui a embrayé en votant cette résolution à destination de la Commission et des États membres, demandant ceci :
1. Le Parlement européen estime que le vélo devrait être reconnu comme un mode de transport à part entière ; demande à la Commission d'élaborer une stratégie vélo européenne dans le but de doubler le nombre de kilomètres parcourus à vélo en Europe d'ici 2030 ; invite la Commission à assurer la collecte harmonisée des données sur le vélo ;
2. Note que la pratique du vélo a augmenté en réponse à la pandémie de COVID et à l'augmentation du prix des carburants fossiles depuis la guerre de la Russie contre l'Ukraine ; encourage les autorités régionales et locales à maintenir les infrastructures cyclables mises en place en réponse à la pandémie par le biais de leurs processus réguliers de planification urbaine, et à prendre des mesures concrètes pour intégrer correctement le vélo dans leurs cadres de mobilité urbaine, tout en reconnaissant son potentiel pour contribuer à une meilleure connectivité entre les zones suburbaines et les centres-villes, en particulier par le biais d'autoroutes cyclables ;
3. Encourage, en vue de favoriser la multimodalité, la création de synergies entre le vélo et les autres modes de transport, comme plus de places pour les vélos à l'intérieur des trains et la mise à disposition de zones de stationnement plus sécurisées pour les vélos dans les gares et les pôles de mobilité ;
4. Considère que les politiques et les subsides européens devraient prendre en compte le vélo lors de la construction ou de la modernisation de l'infrastructure du RTE-T (TEN-T), notamment en ajoutant des pistes cyclables parallèles aux voies ferrées et aux voies navigables, lorsque cela est possible ;
5. Encourage les États membres et les autorités locales à augmenter de manière significative les investissements dans la construction d'infrastructures cyclables séparées, à développer des systèmes abordables de vélos (électriques) en libre-service et à considérer le vélo comme une solution vitale pour le dernier kilomètre dans les nœuds urbains ;
6. Souligne que la planification des infrastructures urbaines devrait être développée conformément à la législation de l'UE en matière de sécurité routière, en intégrant les normes de sécurité pour les cyclistes ; invite la Commission à accélérer ses travaux concernant les orientations sur les exigences de qualité pour des infrastructures cyclables sûres et de qualité prévues par la directive RISM ; souligne la nécessité d'améliorer les technologies des systèmes de transport intelligents afin de mieux reconnaître les cyclistes sur la route ;
7. Invite la Commission à reconnaître l'industrie du vélo, y compris la fabrication de batteries pour les vélos électriques et l'économie circulaire, en particulier les PME, comme des partenaires légitimes dans l'écosystème de la mobilité de la stratégie industrielle de l'UE, ainsi que dans les programmes d'infrastructure industrielle et les régimes de financement ; invite la Commission et les États membres à encourager les projets relatifs au vélo et aux secteurs connexes tels que la mobilité, le tourisme, la santé et le sport, entre autres ;
8. Invite la Commission et les États membres à soutenir la production de bicyclettes et de composants "Made in Europe", stimulant ainsi la compétitivité de l'industrie de l'Union européenne, en comblant le déficit d'investissement, en maintenant des conditions de concurrence équitables au niveau mondial, en stimulant la délocalisation et la sécurité de la chaîne d'approvisionnement, et en encourageant les emplois de qualité, la création de clusters cyclistes et le renforcement de la formation professionnelle liée à l'industrie ;
9. Invite la Commission et les États membres à garantir l'accessibilité du vélo aux personnes à mobilité réduite, ainsi qu'à rendre le vélo abordable pour les groupes vulnérables ; note que le Fonds social européen pour le climat et les fonds structurels et d'investissement peuvent aider les personnes les plus touchées par la "pauvreté des transports" en soutenant l'achat de vélos ou l'accès aux services de partage de vélos ;
10. Demande à la Commission, aux États membres et aux autorités régionales et locales de mener des campagnes d'éducation et de formation, y compris des campagnes d'information, afin de sensibiliser davantage à la sécurité routière ; demande en outre à la Commission de proposer des lignes directrices sur la sécurité à vélo (casques, restrictions d'âge, transport d'enfants, etc.) et demande qu'une attention particulière soit accordée à l'encouragement de la pratique du vélo chez les femmes et les personnes âgées ;
11. Note, dans ce contexte, qu'une application et un contrôle adéquats sont essentiels pour la sécurité des usagers, et demande que l'accent soit mis sur l'application des règles existantes afin d'assurer la coexistence respectueuse des différents modes de transport ;
12. Souligne le potentiel des vélos électriques pour augmenter le nombre de cyclistes ; note qu'afin de maintenir le déploiement rapide et l'accès aux vélos électriques, ceux dotés d'une assistance capable d'atteindre des vitesses allant jusqu'à 25km/h doivent recevoir une classification appropriée dans la législation européenne et nationale ;
13. Souligne qu'il convient de prendre dûment en considération les espaces de stationnement sûrs et sécurisés pour les vélos et la capacité de charge des vélos électriques dans la construction des logements ;
14. Encourage les entreprises, les organisations publiques et les institutions à promouvoir le vélo par des incitants spécifiques, y compris des programmes pour les employés et l'installation d'un nombre suffisant de places de stationnement pour les vélos, et en fournissant des installations sanitaires adéquates ;
15. Souligne qu'il convient de soutenir le tourisme à vélo et le cyclisme dans les zones rurales en accélérant le développement du réseau EuroVelo et de ses 17 itinéraires, avec un soutien plus fort ainsi qu'en exploitant les synergies avec le réseau RTE-T ;
16. Encourage les États membres à réduire les taux de TVA pour la fourniture, la location et la réparation de vélos et de vélos électriques ;
17. Demande à la Commission de désigner 2024 comme l'Année européenne du vélo ;
18. Charge son Président de transmettre la présente résolution à la Commission, aux États membres et à leurs parlements.
C'est donc une véritable politique vélo européenne que le Parlement demandait via cette résolution, c'est-à-dire une stratégie qui prenne vraiment le vélo en compte dans tous les outils de gouvernance européens : réseaux de transports internationaux, directives et règlements, plans de relance et aides économiques et sociales, etc. A noter que le Parlement s'adressait aussi aux états membres pour que ceux-ci activent leurs compétences propres afin de garantir plus de sécurité à vélo pour tous·tes.
Cette résolution a convaincu la Commission de lancer un plan vélo ambitieux d'ici l'été, selon l'annonce faite par son vice-président Frans Timmermans ce jeudi 9 mars :
I am announcing an initiative to boost the bike in Europe. The Commission will propose a European Cycling Declaration and invite the Parliament and Council to join and make this an interinstitutional agreement. We will include principles for supporting cycling, along with access to tools and funds. This will ensure our citizens will not only have the right to cycle, but access to support. European instruments must be used to double cycling in Europe.
Une belle avancée donc sur le plan d'une véritable politique cyclable européenne !