La crise COVID-19 a fortement impacté la mobilité à Bruxelles : après avoir appelé les Bruxellois·es à privilégier le vélo ou la marche pour leurs déplacements, c'est à présent aux navetteurs que la Région s'adresse, via la promotion de "Parks & Bike". Une excellente initiative qui pose toutefois la question du stationnement "navetteur" en voirie.
Plus que jamais, la distance physique de rigueur met en lumière le déséquilibre dans le partage de l'espace public à Bruxelles. En effet, 58% de la voirie y est dédiée à la voiture, dans un contexte où l'étroitesse des trottoirs et pistes cyclables empêche bien souvent de respecter les consignes sanitaires. Pour faire face aux nouveaux besoins, les autorités installent en urgence des zones de rencontre et récupèrent ponctuellement de l'espace automobile afin d'élargir un trottoir ou de créer une piste cyclable. Des mesures qui auront été facilitées par la faible intensité du trafic motorisé durant le confinement.
La mobilité des navetteurs
En temps normal, les déplacements entrants et sortants représentent 1/3 des déplacements en lien avec la région bruxelloise. La grosse majorité d'entre eux s'effectuent en voiture.
À l'heure du déconfinement, alors que la Région encourage ses habitant·e·s à se déplacer à pied et à vélo, il est difficilement concevable que l'espace public bruxellois se retrouve accaparé par le trafic extérieur. Si les pratiques de télétravail vont – dans une certaine mesure – perdurer, il faut par ailleurs s'attendre à une diminution du recours aux transports publics ou au covoiturage pour rejoindre la capitale.
Park + Bike
Dans cette perspective, la Région mise sur une solution "Park + Bike". Les automobilistes sont invités à laisser leur voiture dans l'un des 8 parkings relais gratuits aux frontières de la capitale, et à poursuivre leur trajet en utilisant un autre mode de déplacement. Outre une connexion avec le réseau de transport public, les navetteurs trouveront donc différents services au sein de ces parkings, avec des formules tarifaires spéciales : parkings sécurisés pour vélos, vélos partagés ainsi que vélos électriques et trottinettes en libre-service.
Bien que limitée (une véritable politique de "P+R"1 doit se concevoir à l'échelle métropolitaine et nécessite une collaboration interrégionale), promouvoir des "Parks + Bike" s'avère une démarche nécessaire dans le contexte particulier de la crise sanitaire. Mais cette mesure n'a que peu de sens si les autorités continuent à favoriser le parking navetteur en voirie à l'intérieur de la région, au détriment des infrastructures cyclables.
Parking navetteur vs aménagements cyclables
Le confinement a fait apparaitre clairement, emplacements désertés à l'appui, que certains parkings en voirie sont utilisés exclusivement par des navetteurs. Mais la question du parking reste encore et toujours sensible en région bruxelloise, et le principe STOP2, pourtant omniprésent dans les textes régionaux, peine à s'imposer sur le terrain. Alors que les autorités devraient privilégier la qualité des aménagements cyclables pour encourager les déplacements à vélo plutôt qu'en voiture, on constate que c'est encore loin d'être un réflexe en région bruxelloise. Même en cette période de COVID-19 et de précautions sanitaires.
C'est ainsi que sur le boulevard Général Jacques, situé sur le réseau Vélo PLUS, les autorités régionales ont fait le choix de conserver le parking navetteur en voirie (actuellement vide), au détriment d'une largeur confortable pour la nouvelle piste cyclable : navetteurs ou non, les cyclistes y circuleront donc, jusqu'à nouvel ordre, à la queue leu leu.
1. Un "P+R" ou "Park & Ride" est un parking relais : situé en périphérie de la ville et connecté au réseau de transports publics, il a pour vocation de permettre à l'automobiliste de gagner le centre urbain sans utiliser sa voiture.
2. Le principe “STOP” opère une hiérarchisation entre les différents modes de déplacement dans les politiques de mobilité, en accordant la priorité aux modes les plus universels et les plus durables : d'abord la marche (Stappen), puis le vélo (Trappen), ensuite les transports publics (Openbaar vervoer) et enfin, les véhicules privés (Privé-auto).