40 kilomètres de pistes cyclables supplémentaires : l'annonce de la région bruxelloise, à la veille du déconfinement, s'inscrit en réalité dans la droite ligne du Plan Régional de Mobilité "Good Move" adopté par le gouvernement le 5 mars dernier.
La mobilité post-confinement est un défi d'envergure, d'autant plus dans des villes déjà saturées en temps normal par la pression automobile. Dans la mesure où les transports publics ne pourront pas fonctionner à pleine capacité pour une période encore indéterminée, il est important de capitaliser sur le changement d'habitudes induit par le confinement : nombreux sont celles et ceux qui ont redécouvert leur quartier au guidon d'un vélo, dans des conditions de circulation tout à fait propices (Bruxelles a enregistré une réduction de trafic de 55% à 90% en fonction des axes).
Emboîtant le pas à de nombreuses villes, Bruxelles a donc logiquement annoncé la création de 40 kilomètres de pistes cyclables supplémentaires pour encourager un report modal vers le vélo (plutôt que vers la voiture individuelle).
Des aménagements "temporaires" ?
On pourrait croire que ces pistes réalisées dans l'urgence (parfois dénommées "coronapistes" à l'étranger), n'ont qu'un caractère temporaire. Les tracés priorisés par la région ne l'ont pourtant pas été au hasard : ils se calquent sur le réseau "vélo PLUS" (réseau vélo structurant) du plan Good Move, et correspondent en outre à la volonté affichée par le gouvernement, dans sa déclaration de politique régionale, d'équiper les grands axes d'infrastructures cyclables sécurisées.
Si ces aménagements sont temporaires, ce n'est assurément que dans leur mise en œuvre. Peinture et blocs de béton devront, à terme, faire place à des infrastructures plus conséquentes, qui feront l'objet de procédures urbanistiques réglementaires. Mais leur préfiguration à l'aide d'aménagements légers et réversibles (urbanisme tactique) permet déjà d'expérimenter une nouvelle organisation de l'espace public, dont les enseignements seront précieux en vue d'une concrétisation définitive.
Aménagements cyclables : où et comment ?
Si l'on connait les tracés sur lesquels la région concentre ses efforts, on n'a en revanche que peu d'informations sur la manière dont seront réalisées ces pistes "rapides". Comment seront-elles sécurisées ? Seront-elles suffisamment larges que pour permettre de maintenir les distances physiques préconisées ? Est-il prévu de dédoubler les aménagements existants trop étroits, ou ceux partagés avec les piétons ?
Les cyclistes découvrent donc les aménagements au fur et à mesure de leur concrétisation : la piste cyclable bidirectionnelle sur l'emblématique rue de la Loi – particulièrement remarquée – ainsi que le long du boulevard Reyers, ou encore la piste simplement marquée devant la gare d'Etterbeek, là où une protection physique aurait pourtant été nécessaire.
Assurer la continuité des aménagements cyclables le long des axes concernés est tout à fait primordial, le moindre "chaînon manquant" pouvant compromettre l'intérêt de l'itinéraire entier. Mais l'on peut craindre qu'un manque de sécurisation, ou des aménagements étriqués, peinent à convaincre un nouveau public.
Nul doute que certains regretteront un manque d'ambition en cette période tout à fait décisive pour la mobilité. On aurait pourtant tort de sous-estimer l'importance de cette première étape : la réallocation de l'espace public en faveur des modes actifs reste, plus que jamais, un véritable combat.