Pourquoi le vélo comme mode de déplacement est-il si développé aux Pays-Bas, en comparaison avec des pays voisins comme la France ? L’argument culturel ne peut suffire, ainsi que le démontre le chercheur français Frédéric Héran au travers de sa récente recherche intitulée "Vélo et politique globale de déplacements durables".

Selon l’auteur, l’explication culturelle souvent avancée souffre de tant d’exceptions qu’elle n’est pas crédible. L’histoire des représentations de la bicyclette dans chaque pays n’épuise pas non plus le sujet. L’équipe de recherche s’est donc penchée sur l’évolution des politiques de déplacement urbain et de la forme urbaine qui en découle, et cela pour au moins trois raisons.

Il est d’abord impossible de développer l’usage du vélo sans réduire simultanément l’usage d’autres modes, le marché des déplacements n’étant pas extensible. La pratique de la bicyclette est ensuite très sensible aux conditions de sécurité routière et donc à l’emprise du trafic automobile. Enfin, le vélo ne peut suffire à effectuer tous les déplacements et doit forcément s’intégrer dans un système de transport écologique associant marche, vélo et transports publics.

congestion automobile

L’étude retrace historiquement, chapitre par chapitre, l’évolution des politiques de déplacements urbains. Tout commence avec les origines de la bicyclette moderne dans les années 1880. Le vélo est ensuite démocratisé vers 1920 et connaît partout en Europe un succès cinglant. Cependant, les premières menaces suite aux adaptations de la ville à l’automobile se font sentir. Après la seconde guerre mondiale, avec la montée du trafic automobile, tous les pays européens connaissent une forte chute de la pratique du vélo utilitaire, y compris les pays les plus cyclistes aujourd’hui comme les Pays-Bas ou le Danemark.

Le retour du cyclisme urbain

Dans les années ‘70, suite à de vives réactions face au “tout automobile”, le cyclisme urbain est relancé mais il n’est considéré comme une alternative que dans certains pays, d’autres préférant tout miser sur le développement des transports publics. Les années ‘80-‘90 voient la reprise de la pratique du vélo dans les pays qui ont développé une réelle politique cycliste et la poursuite du déclin dans les autres. En France, le redémarrage du vélo ne se fait qu’au cours des années 2000 dans les centres-villes alors que le déclin continue en périphérie. Le cas édifiant de Strasbourg est détaillé en annexe de l’étude.

Quelques aspects clefs d’une politique de ville cyclable sont développés dans l’étude: importance d’apaiser la ville pour relancer la pratique du vélo, articulation nécessaire avec les transports publics, rôle crucial de la promotion du vélo et de la reconquête des divers publics. La pertinence des arguments économique et de santé publique est pointée par rapport à l’argument écologique.

Aurélie Willems

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