Contrairement à la Belgique, la France dispose d'une observation qualitative des aménagements cyclables dits "de transition". Cette initiative du Club des villes et territoires cyclables permet de suivre la réalisation des 1000 kms d’aménagements annoncés au début du premier confinement. Et de mesurer que l'objectif est atteint à environ 70% après seulement un an.
Pour arriver à une telle estimation, le Club français a réalisé une enquête en trois phases auprès de ses membres adhérents. C'est pas moins de 148 collectivités locales qui ont ainsi accepté de répondre de l'état de réalisation de leurs "aménagements COVID". Des entretiens ciblés ont également été réalisés pour compléter l’enquête en ligne, auprès de néo-cyclistes, de collectivités, de bureaux d'études et d’élu·e·s.
Le Club constate avec plaisir que "le développement du vélo s’engage dans des territoires moins denses, que ce soit du périurbain ou du rural, même s’il est moins développé que dans les centres villes", ce qui est une bonne nouvelle effectivement, et que "le pourcentage de collectivités qui a conduit ses projets d’aménagement de transition à son terme atteint 67% à mi-décembre 2020, chiffre en forte progression depuis septembre (35%) et juin (14%)".
Le Club met aussi en évidence que :
"Malgré la poursuite de la crise sanitaire et un 2e confinement, il n’y a pas eu de 2e vague d’aménagements de transition. En revanche, la dynamique en faveur des modes actifs se prolonge, avec 87% des collectivités qui prévoient de pérenniser voire d’étendre leurs aménagements provisoires."
La plupart des collectivités interrogées, même celles sans aménagements "temporaires", avouent sans détour que le confinement a été l'occasion pour elles de booster leur politique vélo. De lancer une réflexion, un plan vélo, voire même pour 1 collectivité sur 5 de mettre en place un schéma directeur cyclable, c'est à dire une véritable stratégie vélo à long terme. De leur côté les professionnels de l'urbanisme interrogés ont constaté une demande croissante de réaménagements de l'espace public pour les modes actifs.
Depuis le début 2021, cette dynamique d’aménagements cyclables « en urgence » est en train de se tasser, mais il en reste quelque chose de précieux : l'urbanisme tactique est désormais entré dans les moeurs. Déployer rapidement des aménagements provisoires, sans passer par un processus classique long et fastidieux, permet de tester (et de corriger) des idées qui n'auraient sans doute jamais vu le jour s'il avait fallu l'accord de tous les acteurs concernés pour les mettre en place :
"Sur des endroits où il y a des doutes dans l’aménagement à réaliser, là où il n’y a pas de requalification d’espace public, l’aménagement tactique est utile. Dans pleins de situations, il nous permet d’observer immédiatement les usages. Lors des réunions, les gens ne s’imaginent pas les choses avec un plan. Avec l’urbanisme tactique, une fois l’aménagement réalisé, nous bénéficions tout de suite des retours des habitants, des usagers et de l’évaluation par les services. Alors ce n’est pas beau c’est sûr, mais l’intérêt pour moi est tellement évident : on se trompe moins dans l’aménagement définitif."
Valérie Faucheux, Adjointe aux mobilités et déplacements à la ville de Rennes
Dernière réflexion remontant des collectivités locales françaises : « les oppositions des automobilistes restent vives si des voies de circulation disparaissent au profit du vélo ». Le noeud du problème reste donc souvent de reprendre de la place à la voiture dans les villes...