Si les détours coûtent peu aux automobilistes, les cyclistes, eux, y perdent pas mal d’énergie. C’est pourquoi les itinéraires cyclables efficaces privilégient plutôt les lignes droites. Aux Pays-Bas, certaines municipalités, comme Houten ou Groningen, ont décidé d’aller plus loin en créant des plans de circulation par secteur.

Ainsi, la ville de Groningen est divisée en quatre "morceaux de cake". Ces secteurs sont imperméables à la circulation automobile : seuls les cyclistes peuvent passer de l’un à l’autre en ligne droite. Une mesure adoptée à la fin des années 1970 et fortement controversée à l’époque, mais qui a permis de diminuer de moitié le trafic automobile "intra muros" en quelques années.

La même approche prévaut à Houten. Cette localité qui, dans les années 1960, n’était encore qu’une petite ville de 8000 habitants, est située à quelques kilomètres d’Utrecht. Elle fut donc amenée à se développer de manière importante dans le cadre de la politique de planification territoriale des Pays-Bas. En 1979, la ville fut ainsi choisie pour accueillir cinq fois plus d’habitants que ce qu’elle n’en comptait alors. Les autorités locales dessinèrent alors une ville dont les contours forment un papillon. Au centre de celui-ci : la gare principale des chemins de fer et le quartier commerçant. De là, seize quartiers furent dessinés, le tout encerclé par une voie automobile rapide. Comme à Groningen, les automobilistes ne peuvent passer d’un quartier à l’autre par l’intérieur de la ville, mais doivent repasser par le périphérique.

En outre, les voiries à l’intérieur de la ville sont hiérarchisées : du périphérique, les automobilistes pénètrent dans la ville par des "routes de district" interdites aux cyclistes. Puis celles-ci donnent sur "rues de quartier", et enfin sur des "rues résidentielles". Ces deux derniers types de voirie sont organisés sur le modèle des fietsstraten : le cycliste a toujours priorité sur l’automobiliste. Et pour que l’automobiliste saisisse bien le concept, on multiplie les obstacles, comme l’explique Pieter de Jong, chef de projet de l’extension de la ville : “Pour les automobilistes qui déboulent de la voie rapide, il faut un temps d’adaptation à cette situation. Si le premier croisement avec une route cyclable vient trop vite, cela peut être dangereux. Pour ces raisons, nous avons dû parfois réaliser quelques virages supplémentaires sur l’autoroute. À l’intérieur de la ville, nous avons utilisé toute la boîte à outils. Des virages serrés, des pistes cyclables situées plus haut que la route sur laquelle les voitures roulent, des blocs de béton, des potelets en bois, des rétrécissements de chaussée. Tout automobiliste qui croise une route cyclable comprend immédiatement qu’il a affaire à quelque chose de particulier.

Résultat de cette politique volontariste en matière de planification urbaine : un nombre de victimes de la route moitié moindre que dans le reste du pays et une part modale du vélo de 32%. Conséquence logique : alors que la ville doit doubler sa population dans les années qui viennent, la municipalité a décidé de dessiner un deuxième papillon au sud du premier…

Mathieu De Backer

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